Parquet de Moroni : le Procureur Déchu Malgré sa Loyauté aux Autorités
Le décret inattendu remplaçant le procureur de la République près du Tribunal de première instance de Moroni intervient dans un contexte explosif pour la justice comorienne, marquée par plusieurs affaires sensibles impliquant des responsables gouvernementaux. Cette décision surprend d’autant plus que le procureur sortant, Abdou Ismael, était jusqu’ici considéré comme un fidèle relais de la communication officielle, notamment dans la gestion de dossiers à forte teneur politique.
Ces derniers mois, deux affaires majeures ont cristallisé les tensions entre justice, opinion publique et pouvoir exécutif. Dans l’« affaire Bachar », la commissaire au Plan Najda Saïd Abdallah a engagé une action en justice pour diffamation, révélant l’ampleur des rivalités internes au gouvernement. Plus récemment, la diffusion de messages vocaux attribués au commandant de la gendarmerie a semé le trouble au sein des forces de l’ordre : la voix y divulguait de graves accusations de détournements de fonds, provoquant un scandale national.
Dans ces dossiers, le procureur Abdou Ismael s’est illustré par une communication jugée peu conforme à la réserve attendue de sa fonction : conférences de presse improvisées, prises de position rapides pour rassurer l’opinion et disculper les plus hauts responsables, parfois avant même la fin des enquêtes officielles. Le parquet avait par exemple affirmé que les fameux enregistrements audio pouvaient être l’œuvre d’une intelligence artificielle, une explication largement jugée peu crédible par la population et la presse.
La soudaineté du décret nommant un nouveau procureur, Elamine Saïd Mohamed, interroge d’autant plus que le magistrat remplacé donnait toutes les garanties de loyauté au pouvoir. Son éviction apparaît soit comme un sacrifice destiné à calmer la tempête, soit comme une reprise en main plus ferme du parquet par le sommet de l’État. Plusieurs analystes locaux estiment que cette permutation vise avant tout à apaiser une contestation croissante dans l’opinion, qui ne croit plus en l’existence d’une justice indépendante.
Beaucoup considèrent en effet la justice comme instrumentalisée et mise au service du pouvoir, les responsables judiciaires jouant parfois le rôle de bouclier médiatique pour étouffer scandales et querelles internes. La persistance des affaires et la défiance populaire illustrent combien l’État peine à instaurer une réelle transparence dans la gestion des dossiers sensibles, même lorsque ses propres « bons soldats » en paient le prix. HaYba Jumla Digital African Voice From Moroni