À la Découverte des Lauréats: Sitti Djaouharia ChihabiddineFemme d’Affaires Audacieuse, Combattante de la Filière Vanille, Sitti Djaouharia incarne la Foi et la Détermination Au Service d’une Vision Entrepreneuriale Responsable
À l’approche de la cérémonie des Trophées MERIT-COM qui se tiendra le samedi 23 décembre au Palais du Peuple à 15 h 00, nous avons l’honneur de vous présenter l’une de nos Lauréates : Madame Sitti Djaouharia Chihabiddine.
Une force de caractère hors du commun mise au service d’une fascination pour la vanille, rien dans le parcours de Sitti Djaouharia ne la prédestinait à un tel succès entrepreneurial, qui plus est, dans une filière traditionnelle et profondément artisanale. Ses choix avant-gardistes et son instinct de leader déterminée l’ont propulsée au rang de première femme exportatrice de produits de rente aux Comores depuis les débuts de son entreprise Vaniacom, fondée en 1999.
Après une maîtrise en lettres modernes obtenue à l’université Aix-Marseille, suivie d’un DEA en linguistique, elle intègre l’Institut national des langues et des civilisations orientales (INALCO) à Paris. Malgré une route à l’apparence toute tracée vers une carrière dans les langues et les lettres, elle fait le choix déroutant d’abandonner pour rentrer aux Comores.
Elle forme un bureau d’études s’immergeant dans l’univers complexe des études socio-économiques et des projets institutionnels. Elle acquiert une expertise en gestion et des compétences analytiques qui s’expriment au sein du Bureau Comorien de Conseil (BCC), où elle a dirigé et exécuté des études en partenariat avec des organisations internationales.
C’est au cours de cette période, dédiée à l’analyse et à la supervision de projets divers, que Sitti Djaouharia a découvert les cultures de rente, avec un coup de foudre pour la filière vanille. Cette rencontre fortuite avec l’univers artisanal de la vanille aux Comores a marqué un tournant inattendu dans son parcours. Elle prend une autre décision déterminante : fonder Vaniacom.
En 1999, Sitti Djaouharia fonde Vaniacom.Sarl, une société d’exportation qui s’affirme rapidement comme un acteur majeur de la filière vanille aux Comores. Sa détermination à produire une vanille d’excellence et bio fait de Vaniacom la 3e société d’exportation des Comores, pionnière en partenariat bio-équitable depuis 2007.
Femme entrepreneure, épouse et mère de deux enfants, Sitti Djaouharia Chihabiddine se démarque par une personnalité déterminée, empreinte de leadership et d’instinct. Son parcours singulier la positionne comme une capitaine de bateau, naviguant avec assurance à travers les défis tumultueux de la filière vanille. Au fil des années, elle a dirigé sa société vers la réalisation des objectifs de qualité et apprivoisé les tempêtes propres aux fluctuations de cette industrie artisanale délicate et exigeante.
Épice de luxe, la vanille exige un capital humain considérable. Et cela, Sitti Djaouharia l’a rapidement compris et a progressivement intégré cette dimension dans la stratégie de développement de Vaniacom. Plus qu’une « reine de la vanille » comme décrite par le journaliste Olivier Caslin dans un article de Jeune Afrique paru ce mois-ci, Sitti Djaouharia se révèle en véritable Mdzadze (maman) de toute la filière vanille. Son leadership se distingue par une vision axée sur la pérennité de l’excellence de la vanille comorienne. Pour cela, Vaniacom repose sur la valeur humaine de ses membres, les producteurs et préparateurs, majoritairement des femmes.
Dans un contexte économique global où les questions de responsabilité sociale des entreprises sont souvent difficiles à intégrer, Sitti Djaouharia se démarque en s’engageant pour le mieux-être des membres de la filière. Elle a créé la première mutuelle de santé des Comores dans le secteur de la vanille, couvrant plus de 700 employés et partenaires de Vaniacom. Cet acte est d’une importance majeure dans un pays où les dépenses de santé, même pour les travailleurs, sont souvent laissées à la charge des familles à revenu modeste. Le mieux-être des employés et de leur famille devient ainsi le pivot de la stratégie de développement de Vaniacom, plaçant l’entreprise à l’avant-garde des valeurs émergentes dans le monde des affaires.
En 2013, son leadership et son engagement envers la durabilité lui valent la reconnaissance de l’Ordre du Mérite Français.
La vision de Sitti va au-delà de l’exigence de production commerciale. Elle cherche à créer un environnement de travail favorable, mettant en œuvre des gratifications, primes, médailles et bonus pour ses employés. Elle favorise ainsi l’autonomisation des femmes et de leurs familles. Trois quart du personnel sont des femmes.
La cheffe d’entreprise a pris des décisions courageuses en optant très tôt, dès 1999, pour la culture biologique, bien avant que cette pratique ne devienne une expression du quotidien dans le monde, avec une part de marché croissante. La consommation de produits bio dans le monde a plus que triplé durant la dernière décennie. Cette vision précoce illustre son engagement envers des pratiques agricoles durables et positionne Sitti Djaouharia comme une entrepreneure visionnaire, alliant réussite, excellence, bien-être des employés et responsabilité environnementale dans une filière vanille souvent secouée par des crises.
En 2016, elle ouvre sa première boutique à Moroni, le Comptoir des épices, inaugurant ainsi une diversification stratégique de Vaniacom. En plus de la vente de vanille, conditionnée dans des tubes à essai en verre pour garantir une conservation optimale, l’éventail de produits s’élargit pour inclure des variétés telles que les poivres, le curcuma, le gingembre et la muscade. Sa détermination exceptionnelle à maintenir le cap la conduit vers de nouveaux horizons, aux parfums d’industrialisation, avec des projets de développement futurs tels que l’investissement dans une usine de traitement de la vanille aux Comores, visant à maximiser la valeur ajoutée de sa production.
Les défis uniques de la filière vanille requièrent une compréhension profonde des pratiques agricoles, des cycles de récolte, et une sensibilité aux nuances subtiles de la qualité. Des compétences qui ne faisaient pas partie du bagage initial de Sitti Djaouharia. Son succès dans cet environnement artisanal démontre sa capacité à s’adapter, à remettre en question ses approches, à apprendre rapidement et à innover dans un secteur où son audace —mesurée— fait toute la différence.
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