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Julius Nyerere Contre les Politiques d’Ajustement Monétaire Ébranlant l’Afrique

À la suite de la seconde crise pétrolière mondiale de 1979, la Tanzanie a connu une chute abrupte de ses termes de l’échange. Les revenus générés par les cultures d’exportation des agriculteurs ont considérablement décliné, tandis que les impératifs d’importation ne pouvaient être aisément réduits en raison de la croissance démographique et des efforts entrepris pour maintenir la production dans les jeunes usines du pays. Face à cette situation, la Tanzanie a cherché une aide financière sous forme de prêts auprès du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale¹. Toutefois, cette assistance n’a été accordée que sous des conditions strictes, ce qui incluait la sollicitation de l’aide du FMI en 1979.

C’est dans ce contexte que Kjell Havnevik a publié le livre intitulé « Le FMI et la Banque mondiale en Afrique », l’une des premières analyses portant sur les Politiques d’Ajustement Structurel (PAS) mises en œuvre par ces institutions financières internationales. Malheureusement, les PAS ont eu pour conséquence d’aggraver la crise économique et d’entraver le développement des secteurs formels dans plusieurs pays africains, instaurant une paralysie économique les uns après les autres².

Malgré le fait que de nombreux pays africains à économie agricole et non producteurs de pétrole aient été confrontés à des destins économiques similaires en raison des fluctuations du marché mondial, la Banque mondiale et le FMI ont largement imputé les problèmes de la Tanzanie à son programme de développement dirigé par l’État. Ce programme incluait des mesures audacieuses de subventions gouvernementales pour les intrants agricoles destinées aux petits agriculteurs ainsi qu’un secteur industriel parapublic d’envergure³. Cette époque était marquée par « Reaganomics » et « Thatcherism », période où la pensée économique était dominée par les théories néolibérales orientées vers le marché développées par Milton Friedman et Friedrich Hayek.

Au fil du temps, la Banque mondiale et particulièrement le FMI ont imposé une à une leurs exigences liées aux Politiques d’Ajustement Structurel (PAS) à plusieurs pays africains. Ces politiques étaient marquées par trois éléments clés : 1) la dévaluation du taux de change, 2) des coupes budgétaires sévères dans les domaines sociaux et productifs financés par l’État, et 3) la réduction du secteur public parapublic.

Julius Nyerere, figure emblématique, s’est opposé à l’acceptation de ces PAS dictées par la Banque mondiale, marquant sa résistance par un discours mémorable du Nouvel An 1980* (à lire absolument). Dans ce discours, il remettait en question le pouvoir des institutions financières internationales à interférer dans les prises de décision d’un État souverain. Cette position de résistance a perduré pendant six années consécutives, sans parvenir à un accord sur les conditions d’obtention des prêts. Nyerere considérait les conditions imposées par le FMI comme étant à la fois économiquement punitives et politiquement inacceptables.

Face à cette situation, le gouvernement a pris l’initiative de mettre en œuvre sa propre politique d’ajustement structurel via le Programme National de Survie Économique (NESP). Ce programme comprenait des mesures telles que la dévaluation, des coupes budgétaires importantes dans les dépenses gouvernementales, la dissolution des entreprises parapubliques peu performantes et le remplacement des organes de régulation des cultures par des offices de commercialisation**.

Cependant, cette démarche gouvernementale s’est trouvée limitée par l’absence de soutien financier externe provenant du FMI ou des donateurs occidentaux, qui étaient alignés sur les orientations du FMI. Malheureusement, cette absence de soutien a eu pour conséquence une chute drastique de la production agricole d’exportation des paysans tanzaniens.

Arlenis Ali

¹Havnevik, K. (Ed.). (1987). The IMF and the World Bank in Africa : conditionality, impact and alternatives. https://urn.kb.se/resolve?urn=urn:nbn:se:nai:diva-640

²En revanche, lors de la crise financière mondiale de 2008, les gouvernements occidentaux ont généralement réagi avec des politiques inflationnistes de « relance quantitative » et de faibles taux d’intérêt, plutôt qu’avec l’approche de réduction stricte des coûts et de déflation propre aux politiques d’ajustement.³Wangwe, S. (1987). Impact of the IMF. World Bank philosophy: the case of Tanzania in Havnevik (ed.), IMF and the World Bank.*Discours de Nyerere: Nyerere’s New Year Speech, January 1, 1980 https://www.tzaffairs.org/1980/01/nyereres-new-year-speech/*Bryceson, D. F. (1993). Liberalizing Tanzania’s food trade: public and private faces of urban marketing policy 1939-88. https://www.cabdirect.org/cabdirect/abstract/19931803480

Photo : Julius Nyerere, de son nom complet Julius Kambarage Nyerere, surnommé affectueusement « Mwalimu » (enseignant, en swahili), est né en mars 1922 à Butiama, en Tanganyika (actuelle Tanzanie). En 1961, il occupa la fonction de tout premier Premier ministre du Tanganyika nouvellement indépendant, pour ensuite devenir le tout premier président de la nouvelle nation de Tanzanie en 1964. Nyerere fut également la figure prépondérante à l’origine de la création de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA), aujourd’hui connue sous le nom d’Union Africaine. Que son âme continue de reposer en paix.

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