HaYba WEEKEND MAGAZINE®. Monde Swahili

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L’Art de la Mise en Scène : Quand l’Europe Embrasse la Côte Swahili

À travers deux photographies dévoilant les salons de la Résidence Britannique à Zanzibar, datant approximativement des années 1880 et 1890, se dessine une fascinante ressemblance dans la manière de présenter la photographie au sein des demeures de l’élite arabe omanaise et de la communauté européenne de Zanzibar (Photos C et D). De la même façon que dans la salle de l’homme omanais (Photo A), on observe ici aussi une mise en scène soignée des photographies, qui sont disposées en tant qu’objets distincts à contempler. Elles ornent les murs des pièces ou reposent avec élégance sur des tables et des étagères.

Que ce soit dans les maisons européennes ou arabes, ces clichés sont encadrés par une multitude de bibelots de style victorien. Toutefois, ils se détachent nettement des autres éléments décoratifs intérieurs, car leur présence n’est pas anodine. Le spectateur est invité à plonger son regard dans les personnalités immortalisées sur les images.

Mais ce qui rend ces photographies encore plus intrigantes, c’est leur origine. En effet, celles qui ornent ces intérieurs ne sont pas des acquisitions faites sur un marché pour leur caractère exotique. Elles ne sont pas des objets vus comme des curiosités lointaines. Bien au contraire, ces photographies sont bien plus que cela. Elles sont des portraits, des témoins de moments passés et des reliques familiales, conservées avec soin et émotion.

Cependant, il serait une erreur de croire que les préférences esthétiques des non-Européens vivant à Zanzibar étaient simplement une version « locale » des styles en vogue à l’époque de la British Raj ou de l’ère victorienne. En réalité, lorsque les Européens – qu’ils soient commerçants, fonctionnaires gouvernementaux ou missionnaires – s’établirent sur la côte Swahili, ils ont choisi de louer les maisons des habitants locaux et d’adopter également les éléments décoratifs typiques des maisons côtières, bien que réservés à l’élite de la région. Les somptueuses demeures en pierre, considérées par les Européens comme incarnant les raffinements de la vie « arabe », devinrent particulièrement prisées parmi les immigrants européens.

Parmi ces nouveaux arrivants, on retrouve Oskar Baumann, un géographe autrichien au style excentrique, qui prit grand plaisir à adopter le mode de vie et le look d’un patricien côtier pendant son séjour en Afrique de l’Est. Une photographie de Baumann datant de 1893, alors qu’il avait vingt-neuf ans, et reproduite en demi-teinte dans son ouvrage « Through Massailand to the Source of Nile Massailand », nous offre un aperçu de sa demeure zanzibarite ainsi que de sa manière de s’approprier les éléments de décoration locaux (Photo E).

La scène capturée par la photographie nous présente Oskar Baumann, confortablement assis sur les escaliers menant aux galeries du deuxième étage de sa somptueuse résidence en pierre. À ses côtés se tiennent deux de ses employés. Un kofia, cette calotte typiquement portée par les hommes le long de la côte Swahili, coiffe sa tête, inclinée avec une désinvolture charmante sur le côté. Son regard est perdu au loin, un sourire rêveur s’inscrivant sur ses lèvres.

Les murs qui l’entourent sont drapés de textiles et de tapis importés, ornements caractéristiques du style « oriental » ou des influences de l’océan Indien qui trouvent faveur auprès de nombreux habitants de Zanzibar. Baumann, de retour à Zanzibar après une expédition de deux ans en Afrique centrale, a également enrichi l’atmosphère de sa demeure d’exotisme ethnographique, notamment des lances, des boucliers et un masque. Cette fusion de pièces provenant de l’océan Indien et de « souvenirs » africains traduit également la personnalité minutieusement cultivée de Baumann en tant qu’individu ayant adopté les codes locaux. Une identité qu’il a également habilement décrite dans ses nombreuses œuvres publiées.

Arlenis Ali

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